vendredi, 05 décembre 2025 Faire un don
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«Les gens se sentent abandonnés» : un évêque nigérian dénonce l'aggravation de la crise humanitaire dans l'État de Benue

Mgr Wilfred Chikpa Anagbe, de la diocèse catholique de Makurdi au Nigéria, a exprimé son inquiétude face à l’aggravation de la situation humanitaire dans l’État de Benue, accusant les autorités de négligence et de complicité dans les violences qui ont déplacé près de deux millions de personnes dans son diocèse.

Dans une interview accordée à ACI Afrique en marge d’une messe d’action de grâce organisée dans l’archidiocèse catholique d’Abuja pour marquer le 400ᵉ anniversaire de la Congrégation de Saint Vincent de Paul (CM/Vincentiens), Mgr Anagbe a affirmé que la crise humanitaire dans le diocèse de Makurdi et dans d’autres régions du pays ne pouvait être considérée comme une catastrophe naturelle, mais devait être reconnue comme le résultat d’actions humaines et d’une inaction délibérée de la part des responsables.

« Le gouvernement ne peut pas prétendre ignorer la situation dans l’État de Benue, où se situe le diocèse de Makurdi. Des millions de personnes dans mon diocèse sont déplacées, vivant dans des camps sans commodités de base, tandis que les attaques contre les communautés se poursuivent », a déclaré l’évêque nigérian à ACI Afrique le lundi 1ᵉʳ septembre.

Il a souligné que le sort des personnes déplacées dans l’État de Benue était devenu l’un des défis humanitaires les plus graves du pays.

« Le peuple se sent abandonné, et l’Église ne peut pas garder le silence face à cette injustice », a ajouté Mgr Anagbe.

Le membre nigérian des Fils Missionnaires du Cœur Immaculé de Marie (CMF/Clarétains) a expliqué que la crise au Benue n’était pas seulement un problème sécuritaire mais également un défi économique grave, avec des implications sur la production alimentaire du pays.

« Le Benue est considéré comme le grenier du pays, mais notre peuple ne peut plus cultiver ; ils sont réduits à mendier sur leurs propres terres, tandis que des groupes armés occupent librement leurs maisons ancestrales. Cela a de lourdes conséquences sur la sécurité alimentaire et la stabilité du pays », a-t-il déploré.

Mgr Anagbe a indiqué que l’Église apportait le soutien qu’elle pouvait aux déplacés, mais que ses ressources restaient insuffisantes face aux immenses besoins dans les camps.

« Nous crions non seulement pour la nourriture et l’abri, mais pour la justice et la paix. Le monde ne doit pas détourner le regard pendant que notre peuple souffre », a-t-il insisté.

Le responsable catholique a également dénoncé ce qu’il a décrit comme une absence délibérée de volonté politique pour résoudre la crise. Il a relevé que, bien que de nombreux dirigeants parlent des défis sécuritaires, peu d’actions concrètes sont entreprises pour permettre aux déplacés de rentrer chez eux en toute sécurité.

« Comment expliquer que des communautés entières soient anéanties sans qu’aucun responsable ne soit tenu pour coupable ? Comment comprendre que des populations soient chassées de leurs terres et que les envahisseurs y demeurent sans être inquiétés ? Ce sont des questions qui révèlent la complicité des autorités », a déclaré Mgr Anagbe.

Et d’ajouter : « Nous nous trouvons dans une telle situation que nous ne pouvons pas ignorer, en tant que prêtres, missionnaires, catholiques et chrétiens. Même comme simples êtres humains, nous devrions éprouver de la sympathie et de la compassion pour ce que vivent ces personnes aujourd’hui. »

L’ordinaire du diocèse de Makurdi depuis mars 2015 a indiqué que le Benue restait l’un des États les plus touchés, avec neuf camps de déplacés internes (PDI) officiellement reconnus par le gouvernement rien que dans son diocèse.

Il a précisé que ces camps étaient surpeuplés, accueillant des milliers de familles chassées de leurs foyers par des attaques persistantes.

« Dans un seul camp, il y a plus de 3 000 ménages, pas seulement des personnes. On en trouve dans le diocèse d’Otukpo, à Katsina-Ala, à Gboko et dans d’autres endroits. Et ce n’est pas seulement au Benue. La même situation existe dans l’État du Plateau, dans l’État de Taraba et un peu partout dans ce pays », a-t-il raconté.

Mgr Anagbe a déclaré que cette situation reflétait une tragédie nationale qui exigeait une action urgente. « Ce n’est pas une catastrophe naturelle. C’est calculé. Il y a une raison qu’ils connaissent, un agenda qu’ils ont, et cela se produit chaque jour dans le silence », a-t-il déploré.

L’évêque nigérian, qui s’est montré très critique face à la montée de la violence au Benue, a souligné que l’inaction du gouvernement allait au-delà du silence, parlant d’un soutien délibéré aux assaillants.

« Le gouvernement aide et soutient l’insurrection. Ce n’est pas seulement une conspiration du silence. Il aide et soutient ce qui se passe », a affirmé Mgr Anagbe.

Il a aussi dénoncé l’absence de responsabilité malgré des années d’attaques contre des communautés rurales. « Toutes ces années, nous avons parlé, personne n’a été arrêté. Et quand on annonce une arrestation, qu’ont-ils fait de ces personnes ? » s’est-il interrogé.

Il a réaffirmé que l’Église continuerait à se tenir aux côtés des déplacés, même si ses ressources étaient limitées.

L’évêque catholique a insisté sur le fait que le peuple ne pouvait pas rester silencieux face à de telles menaces graves contre la vie et la dignité humaines, exhortant tous les Nigérians à exiger justice et responsabilité. « La dignité de la vie humaine est en jeu ; si nous n’agissons pas maintenant, nous en paierons tous le prix », a déclaré Mgr Anagbe à ACI Afrique le 1ᵉʳ septembre.

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